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Dernière modification le 01 mai 2008


Difficultés

Des tentatives de gestion peu coordonnées et mal élaborées, la rareté des retours d’expériences et des lacunes de connaissances engendrent un flou certain dans la compréhension du phénomène par le grand public et les décideurs.


L’augmentation sans précédent du nombre d’invasions biologiques au cours du XX ème siècle dans des écosystèmes déjà fragilisés par les activités humaines a conduit les scientifiques à s’interroger sur les moyens de lutte contre les espèces invasives. Ils ont donc mené des études afin d’acquérir des données sur la biologie et l’écologie locales des espèces les plus prolifiques (Jussies, Myriophille du Brésil…). Des mesures de gestion ont été envisagées à partir de ces données par les associations, les laboratoires de recherche, les gestionnaires des espaces naturels. Parfois, des rencontres sont organisées entre les différents acteurs concernés (Services de l’Etat, associations de pêche…) afin de confronter les différentes expériences.
En Bretagne, l’Inra en collaboration avec des gestionnaires d’espaces protégés - la Ligue pour la Protection des Oiseaux (LPO), Bretagne Vivante-SEPNB , le Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres (CEL), l’appui logistique de l’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) - et grâce à des financements privés (Lipha), nationaux (Ministère de l’Environnement , DIREN Bretagne), régionaux (Région Bretagne) et départementaux (Finistère) a élaboré et mené à bien des opérations d’éradication des populations insulaires de Rats surmulots de six archipels bretons de la Manche et de l’Atlantique. Diverses conséquences de l’élimination de l’espèce allochtone ont été quantifiées.

En Bretagne continentale, l’Institut d’aménagement de la Vilaine (EPTB Vilaine) a mené quelques opérations de contrôle de la Jussie. D’autres plantes aquatiques ont fait l’objet d’arrachage manuel ou mécanique ou encore de traitement par des pesticides souvent infructueux (Myriophylle du Brésil, Egérie dense sur l’Oust et le canal de Nantes à Brest).
Les plantes terrestres comme l’Herbe des pampas, la Renouée du Japon… n’ont fait l’objet que de mesures très localisées même si de plus en plus de communes s’engagent dans la lutte contre les espèces invasives.
Sur le littoral, la lutte est plus avancée. Les populations de Crépidule en Baie de Saint-Brieuc et en rade de Brest font l’objet d’une gestion concertée (Laboratoire Lemar…). De gros efforts sont ainsi consentis par les gestionnaires afin d’enrayer la propagation de ce mollusque dont le développement concurrence la Coquille Saint-Jacques, mettant en péril les activité de pêche.
De même, le CEL a dressé la liste des plantes invasives sur la côte de la presqu’île de Crozon et préconisé des interventions. Certaines communes comme Larmor-Baden en partenariat avec l’Association Bretagne-Vivante ont pris en main la gestion du Baccharis sur leur territoire, y consacrant du temps et de l’argent.
Malheureusement, nombre d’espèces introduites ne font pas encore l’objet d’un suivi régulier (Raton laveur…). La recherche des effets de ces espèces sur les écosystèmes d’accueil en région Bretagne demeure limitée voire inexistante. Or cette phase d’acquisition de données précises est indispensable à l’élaboration d’une stratégie efficace de gestion des espèces envahissantes. Les seules tentatives de gestion jusqu’alors mises en place ont porté sur des espèces dont les impacts, évidents, portent préjudice à l’activité économique ou à la santé humaine.

Par ailleurs, certains désaccords subsistent toujours entre le grand public et les différents gestionnaires des milieux naturels. S’il est largement admis que l’introduction d’une nouvelle espèce dans un écosystème n’est pas neutre, pour beaucoup encore, les espèces introduites ont un effet inexistant voire bénéfique sur les écosystèmes d’accueil. Par exemple, la controverse sur l’Ibis sacré, est toujours vivace dans le Morbihan où il subsiste encore des divergences sur la gestion de cette espèce.

Cependant, pour la plupart des espèces allochtones, les effets de leur introduction n’ont pas encore été mesurés avec une méthode scientifique. Comment dans ce cas affirmer que leur effet est nul ? Et comment concilier cette perception et le principe de précaution clairement exprimé dans le Code de l’Environnement français ?
Même si on connaît les effets dévastateurs des invasions biologiques sur la diversité, il reste important d’engager une recherche concertée sur la biologie des espèces introduites et leurs liens avec les écosystèmes d’accueil afin d’en mesurer précisément les impacts qu’elles y provoquent. Seule cette méthode permettra d’élaborer des solutions de gestion adéquates : ne rien faire, contrôler ou éradiquer totalement quand c’est encore possible.
Enfin, il est souhaitable que le grand public soit informé clairement sur le sujet et que les espèces invasives ne soient plus vendues en animalerie ou en jardinerie, cette source représentant actuellement un risque majeur en France

Rédigé par Fabrice Pelloté (Inra), en collaboration avec Philippe Clergeau, Olivier Lorvélec et Michel Pascal (Inra), Jacques Haury (Agrocampus) et Sylvie Magnanon (CBNB).